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Affaire Mebe Ngo’o : Le Colonel Eli Mboutou dans l’étau d’une campagne de sabotage

Mon Colonel, à la suite de votre démonstration sur l'histoire de la mallette d'argent, pour vous quelle est l’origine de cette rocambolesque histoire ?

Cette histoire est partie d’une note d’un responsable du ministère de la défense. Pour la manifestation de la vérité et pour une meilleure compréhension de votre Tribunal, je vais me permettre de faire une présentation chronologique des événements, depuis mon départ du Secrétariat Militaire : Le 6 avril 2016, alors que j’étais en attente de mon accréditation, j’avais été envoyé en mission à Paris où j’étais arrivé au petit matin de ce jour-là. Après mon installation à l’hôtel Majestic où j’avais mes habitudes, j’ai été interpellé par les policiers de l’Office central de répression de la grande délinquance financière (OCRGDF), moins de 3 heures après mon arrivée sur le sol français. Emmené à leur bureau, j’avais été interrogé sur commission rogatoire du juge chargé de l’instruction de l’affaire MAGFORCE, sur mon rôle dans les marchés au ministère de la défense du Cameroun.

Après 48h de garde à vue, j’avais été mis en examen et placé sous contrôle judiciaire, pour corruption passive d'agent public étranger et recel d’abus de biens sociaux. Une caution financière de 50.000 euros avait été fixée, représentant les frais de justice et le remboursement du préjudice éventuel causé, dont 45.000 euros étalée sur 18 mois. La mention du « préjudice éventuel » employée par le juge français est révélatrice de l’absence de certitude qui caractérise les faits relatifs à cette affaire. Le 11 août 2016, j’avais pris effectivement service à Rabat au Maroc. Dès le 8 octobre 2016 au soir, l’information sur mon arrestation avec une mallette d’argent a commencé à circuler dans les réseaux sociaux.

Elle sera reprise et amplifiée à partir du 10 octobre par des activistes connus des réseaux sociaux… la toile s’est enflammée. Les journaux camerounais « La Nouvelle », « Le Courrier International » et « L'Epervier » en ont fait leurs Unes et y sont revenus sans arrêt pendant plus de 2 mois. Au même moment, une note en date du 13 octobre 2016 était adressée au ministre délégué à la présidence chargé de la Défense. Cette note était signée du Chef division de la Sécurité militaire, le Lieutenant-colonel d’alors, aujourd’hui Colonel Bamkoui Émile Joël. Cette note, je le répète, a été à l’origine de toute cette cabale médiatique. Lecture de la note dont transcription est ci-dessous a été faite par le Colonel Mboutou : " Objet : Interpellation du lieutenant-

colonel Mboutou à Paris Des sources signalent que l’Officier Supérieur cité en objet, Attaché de défense du Cameroun au Maroc, a été interpellé par les services secrets français à Paris alors qu’il négociait l’achat d’appartement de luxe. Une somme de deux millions d’euros aurait été  saisie sur lui et une enquête a été ouverte. Selon la même source, les faits se seraient déroulés le 04 octobre 2016 où la direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) l’aurait interpellé à Georges V près des champs Elysées à Paris.

A l’issue, il aurait été entendu par un Juge d’Instruction criminel puis relaxé sous caution. Des recoupements effectués par la Sécurité Militaire, il ressort que ses renseignements sont bel et bien fondés. Car le 06 avril 2016, le nommé Mboutou Ghislain Victor né le 28/07/1968 à Sangmélima au Cameroun a été arrêté par l’Office Central de répression de la Grande délinquance financière (OCRGDF) à l’Hôtel Majestic situé au 30 rue la Pérousse à Paris dans le XVI Arrondissement. Il a été mis en cause dans une affaire qui date de 2013, relative à des faits de :

  • Abus de biens ou de crédits d’une société par actions par un dirigeant à des fins personnelles ;
  • Proposition ou fourniture d’avantage à un agent public d’un Etat étranger ou d’une Organisation Internationale publique ;
  • Blanchiment aggravé.

Une information judiciaire a été ouverte chez un Juge d’Instruction. Fort de tout ce qui précède, le Lieutenant-colonel, chef de la Division de la Sécurité Militaire propose pour plus de renseignements au sujet de ce vaste réseau qui touche certains membres du gouvernement camerounais, qu'un recoupement soit effectué à Paris et qu’une enquête judiciaire soit ouverte, pour établir les responsabilités des uns et des autres, et disculper ainsi l’Etat du Cameroun qui serait cité dans cette scabreuse affaire. Cette note tient lieu de compte rendu. (e) Lieutenant-colonel Bamkoui Emile Joël. Chef de division de la Sécurité militaire."

Il y a lieu de relever la similitude entre les informations relayées dans les médias et celles contenues dans la note en question. Il est ainsi rapporté que j’avais été interpellé le 04 octobre 2016 par les agents de la Direction centrale du Renseignement intérieur (DCRI), ce qui est évidemment faux, mais était abondamment relayé par les réseaux sociaux et les médias et confirmé par ladite note.

Comment pouvez-vous expliquer cette concomitance ?

Cela sous-entend qu’il y avait une connivence entre lesdits médias et l’auteur de la note. D’ailleurs, le 18 novembre 2016, je reçois du ministère de la défense un billet d’avion Casablanca-Yaoundé. Le même jour, un article posté en ligne à 18h32 de Cameroon-Info.Net, citant un article du journal L'Epervier du même jour, annonce ma convocation au Cameroun. Ces fuites dans les médias sont révélatrices de ce qu’elles venaient du ministère de la défense.

Le dimanche 20 novembre 2016, j’arrive à Yaoundé. Le lundi 21 novembre 2016, je me suis présenté au Chef de Secrétariat Militaire, à sa demande, le Capitaine de Vaisseau Tchouatat Joseph, mon chef hiérarchique, alors que j’étais Chef Secrétariat militaire Adjoint. Il m’a notifié mon rappel au Cameroun en me remettant le décret présidentiel le sanctionnant. Il m’informera par la même occasion de ma mise à la disposition du Chef d'État-major de l’Armée de l’Air.

Le 12 décembre 2016, après avoir été reçu par Mr Beti Assomo, ministre Délégué à la présidence chargé de la Défense à sa demande, j’ai adressé un compte-rendu explicatif au Chef de l’Etat, Chef des Forces Armées, que j’ai remis au Chef de Secrétariat Militaire pour transmission par la voie hiérarchique, conformément aux usages. Le 03 janvier 2017, j'ai adressé une correspondance au Ministre délégué à la Présidence chargé de la Défense, dans laquelle je sollicitais, entre autres, une autorisation de sortie afin de répondre au contrôle judiciaire en France. Cette correspondance, transmise le 05 janvier 2017, par le Chef d’Etat-Major de l’Armée de l'Air, ainsi que celle adressée au Chef de l’Etat seront retrouvées en 2018, dans un tiroir du bureau du Capitaine de Vaisseau Tchouatat Joseph, après son départ à la retraite. Il n’avait donc pas présenté lesdites correspondances au Ministre. Je n’ai pas ainsi pu donner ma version des faits à la hiérarchie, encore moins obtenir l’autorisation de faire face à la justice française.

Le 31 janvier 2019, un document du Chef division des enquêtes du Corps spécialisé d’Officiers de Police judiciaire du Tribunal criminel spécial, circulant sur les réseaux sociaux, fait état d’une interdiction de sortie du territoire national concernant Mebe Ngo’o, son épouse, Mbangue Maxime et Moi. Entre-temps une correspondance du Procureur Général près le Tribunal Criminel Spécial, en date du 29 janvier 2019, transmettait au Chef de Division des enquêtes, une correspondance du Directeur de l’ANIF adressée au Secrétaire général de la présidence de la République, sur des « faits répréhensibles décelés dans la Société MAGFORCE filiale du Cameroun » .

Dans sa correspondance, le Procureur général demandait l’ouverture d’une enquête approfondie afin d’obtenir « plus d’amples informations sur les transactions financières occultes de la Société MAGFORCE avec les personnalités camerounaises impliquées » Le 13 février 2019, je suis convoqué et auditionné à la Division des enquêtes comme témoin dans le cadre d’une procédure de détournement de deniers Publics contre Mebe Ngo’o Edgar Alain.

Au cours de cette audition, où Mr Mbangue Maxime Léonard m’avait précédé quelques instants avant, je serai interrogé sur mon rôle dans la passation des marchés au ministère de la défense, la réception éventuelle des retro commissions au profit de Mebe Ngo’o, l’histoire de la mallette de 2 millions d’euros, l’étendue de mes biens et ma relation avec Mebe Ngo’o. Le 5 mars 2019, je suis convoqué et auditionné à la Division des Enquêtes du Corps Spécialisé d’Officiers de Police judiciaire, cette fois-ci comme suspect.

Je serai interrogé sur la période de mon implication dans le processus de passation des marchés, les retro commissions dans les marchés au ministère de la défense et mon implication dans les négociations du projet Polytechnologies. Je serai placé en Garde à Vue à l’issue de mon audition. Que s’était-il donc passé du 13 février au 05 mars 2019, pour que je passe de témoin à suspect ? Je suis convaincu que les déclarations de Mbangue lors de ses auditions du 13 février 2019 et du 19 février 2019 y ont été pour beaucoup.

Le 8 mars 2019, suite au réquisitoire introductif du Procureur Général près le Tribunal Criminel Spécial, j’ai été inculpé et placé en détention provisoire à la Prison Centrale de Kondengui. Il faut noter qu’au cours de ces auditions à l’enquête préliminaire, aucun fait ni document ne m’avaient été opposés, mais seulement des allégations sans preuves et des allusions aux rumeurs circulant sur internet.

Pourquoi pensez-vous que l’accusation avait pu se laisser influencer par ce qui était dit les réseaux sociaux ?

Pour mieux vous édifier à ce propos, je voudrais citer l’extrait de la fameuse correspondance de l’ANIF ci-après : « il convient de relever que des informations publiées par diverses sources sur internet mentionnent la participation de Mme Mebe Ngo’o Bernadette, du Colonel Mboutou Elie Ghislain, de Mbangue Maxime Léonard et des dirigeants de MAGFORCE notamment Robert Franchitti et François Gontier dans cette affaire ». En quelques semaines, les évènements vont s’enchaîner, Le 16 octobre 2019, après 7 mois et 8 jours de détention, je suis auditionné pour la première fois par le juge d’instruction. Ses préoccupations porteront, entre autres, sur mon rôle dans la passation et l’exécution des marchés au Ministère de la Défense, sur les fonds que j’aurais reçus des prestataires en faveur de Mebe Ngo’o, et sur des acquisitions immobilières en France pour le compte de Mebe Ngo’o, donc, encore une fois, la sempiternelle histoire de la mallette d’argent. Le 27 janvier 2020, soit 10 mois et 16 jours après mon inculpation, je suis auditionné pour la deuxième fois par le juge d’instruction.

C’est au cours de cette audition que me seront présentés, pour la première fois, les marchés mis en cause et récupérés auprès de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême. Je suis appelé à répondre sur la structuration des prix dans lesdits marchés et sur l’effectivité des livraisons y afférentes, toutes choses n’ayant pas été dans mes attributions de Chef Secrétariat Militaire Adjoint, conformément aux dispositions de l’article 7 du décret 2001/177 déjà cité. Missions n’ayant même pas été assumées par moi dans les faits. Le 16 avril 2020, je suis auditionné pour la 3ème fois devant le juge d’instruction. Il sera essentiellement question de mon interpellation du 6 avril 2016 à Paris et de la procédure en France, vraisemblablement à la suite d’une demande d’entraide judiciaire en matière pénale des juges français. Le 30 juin 2020, je suis appelé en confrontation devant les témoins de l’accusation, sans que je ne sois confondu sur quelques actions que ce soient.

Revenons encore une fois sur la correspondance du Directeur de l'ANIF, à l'origine de cette procédure. Quelles observations faites-vous des recommandations et conclusions du Directeur de l’ANIF ?

Permettez-moi de lire quelques extraits avant de répondre à la question. « Les services homologues étrangers saisis n’ont pas fourni d’informations sur les transactions opérées par la société MAGFORCE et ses filiales, au bénéfice des personnes ou de sociétés au Cameroun (probablement compte tenu des procédures judiciaires en cours dans leurs pays). Ces informations peuvent être obtenues dans le cadre d’une procédure d’entraide judiciaire avec la France et la Belgique » . La correspondance conclut que :

  • « - les fonds d’origine injustifiée, manipulés dans les comptes bancaires du sieur Mebe Ngo’o et son épouse pourraient provenir des rétro commissions de la société MAGFORCE et ses dirigeants
  • les investissements attribués aux intéressés et évalués à plusieurs milliards ont pu être réalisés avec les rétro commissions perçues
  • - Mekou Onyong Gisele, Essam Onyong Didier et la société MAGFORCE Cameroun auraient été utilisés pour le paiement des rétrocommissions au Cameroun. La saisine des autorités françaises et belges pourrait permettre d’obtenir de plus amples informations sur les transactions occultes de la société MAGFORCE International avec des dirigeants camerounais ». La première observation est que mon nom ne ressort pas dans les conclusions de cette correspondance. La deuxième observation est que, contrairement aux prescriptions du Procureur Général, les mesures conservatoires à savoir interdiction de sortie du territoire national et blocage des comptes, n’ont pas concerné certaines personnes dont les noms sont cités dans la dénonciation de l’ANIF et dont les preuves sont établies par rapport à l’objet même de la correspondance à savoir « Situation de la société MAGFORCE au Cameroun ».

Il s’agit d’un des actionnaires de ladite société détenant 10% d’actions (Essam Onyong Didier) et d’une des personnes ayant reçu des virements d’argent de la part de la société MAGFORCE International (Mekou Onyong Gisèle). Les mesures conservatoires m’ont plutôt concerné, moi qui n’avais entendu parler de la société MAGFORCE Cameroun pour la première fois que le 13 février 2019 lors de ma première audition. La 3ème observation est que, par cette correspondance datée du 03 août 2018, le Directeur de l'ANIF, qui reconnaît ne pas disposer d’éléments factuels, suggère la procédure d’entraide judiciaire pour obtenir des informations me concernant.

En effet, les résultats de la Commission Rogatoire Internationale du juge d’instruction Betea Jean, ont été présentés par le ministère public devant ce tribunal, lors de l’audience du 29 mars 2021, soit 24 mois et 21 jours après mon inculpation. Entre-temps, la demande d’Entraide Judiciaire en Matière Pénale de la justice française, datée du 23 octobre 2019, soit 07 mois et 15 jours après mon inculpation, n’avait nullement fait mention d’une histoire de mallette d’argent, mais plutôt de la procédure pendante devant la justice française, basée sur des soupçons de corruption et pour laquelle j’avais payé une caution financière, mais n’avais pas pu obtenir l’autorisation de répondre aux convocations du juge d’instruction.

Au regard de ce qui précède, j’estime que non seulement j’ai été inculpé et placé en détention sur la base de faits inexistants, mais que même, mon maintien en détention ne se justifie pas. En effet, mes différentes auditions, tant à l’enquête préliminaire qu’à l’information judiciaire, la demande d’entraide judiciaire en matière pénale de la justice française, les résultats de la Commission Rogatoire Internationale du juge d’instruction Betea et l’absence d’éléments factuels contre moi jusqu’à ce jour, tel que je vais le démontrer au cours de cet exercice, me confortent dans cette posture. Cela s’appelle de l’acharnement, un acharnement qui ne vise qu’un seul but, briser la carrière d'un homme. La séance a été suspendue par la présidente et la cause renvoyée au 1er juillet pour la suite de l'Examination-in-chief de l'accusé Mboutou. Rendez-vous le vendredi 1er juillet 2022.

 

 

Le Messager