Cameroun-L’homme politique et universitaire Vincent Sosthène Fouda écrit un ouvrage sur l’assassinat de Monseigneur Benoit Bala

Vincent Sosthène Fouda

Devoir de mémoire donc d’histoire sans testament.

Les camerounais sont des hommes et des femmes qui se trompent de colère Dès les premières heures de la matinée, nous nous retrouvâmes ma jeune épouse, mon frère, ma sœur aînée et moi-même à Oveng pour les funérailles traditionnelles de Jean-Marie Benoît Bala. Ce n’était plus l’évêque, mais le fils du terroir, l’Etoudi, le petit fils des Tsinga, mais surtout le fils de ce carrefour de tribus où tout se mélange pour donner vie à un peuple, qui était pleuré.

Assez rapidement, je découvris que rien n’avait été préparé mais tout avait été dicté depuis le palais de l’unité par le Directeur du Cabinet Civil de la présidence. Les Etoudi de Mballa II arrivèrent en grand nombre suivant la devise de ce peuple qui veut que bien que deux familles, il ne puisse pas avoir de ligne entre elle où un filet d’eau ne passe et repasse. Le ministre, le député. J’utilisai donc mon véhicule pour aller chercher les tam-tams devant servir à appeler l’âme du mort enterré à Bafia afin qu’il vienne rejoindre les siens. Vers 14 heures nous nous retirâmes dans le bosquet comme il est de tradition pour interroger les ancêtres et les vivants. Nous devions nous asseoir pour creuser en profondeur pour savoir de quoi est décédé Mgr Bala. Rien ne fut possible, nous étions là debout, fuyant la mémoire, refusant la construction de notre propre identité.

Deux camps se formèrent assez rapidement, celui ayant les consignes du ministre directeur du cabinet civil et celui des pauvres gens sans moyen financier donc sans parole. Les plus nantis et porteur du message de la République se mirent donc avec une dextérité sans faille à déconstruire la douleur, l’image et le souvenir de Jean-Marie Benoît Bala. 47 minutes après, quand nous décidâmes enfin de sortir de ce bois de la honte, tout était fini. La mémoire n’était plus un trésor mais un vaste trou aux émanations sépulcrales nauséabondes. Jean-Marie n’était plus un « Martyr de l’Amour » comme j’avais tenté de l’imposer (la vérité n’était pas autre),mais un suicidé, une arme contre lui-même, contre la mémoire, un visage hideux dont il fallait rapidement se séparer pour lire une lettre de remerciement adressée au Chef de l’État et permettre ainsi à Mgr Jean Mbarga petit fils Tsinga lui aussi de danser l’Essani, bref de triompher. Nous étions le 7 octobre 2017, une forte pluie s’abattit alors sur le village, dans l’hypocrisie nôtre, nous eûmes une double interprétation, malédiction pour les uns, bénédiction pour les autres ; les deux étaient rendues possible par la seule volonté de notre hypocrisie.

Vincent Sosthène Fouda

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