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L’usine des tracteurs croupit dans la broussaille

Transmis tel que lu sur le net

Cette super structure destinée à assembler des machines agricoles, annoncée par le chef de l’Etat au comice d’Ebolowa en 2011, n’est aujourd’hui qu’une vue de l’esprit.

Contraste étonnant. L’usine des tracteurs d’Akak Essatolo qui grouillait de monde, il y a quelques années est sans vie. Nous sommes le 29 avril dernier, il est presque 10 heures. Plus une trace de l’entreprise Immobiliarée, à qui incombait la gestion de la structure. L’entrée principale et la guérite sont envahies par de hautes herbes.

A l’intérieur, seule une moto garée devant le bâtiment qui, jadis faisait office de salle de conférence, indique une présence humaine sur les lieux. Dans la salle en question, deux éléments de la police nationale surpris en plein sommeil à cette heure de la matinée, sont en faction. «Nous sommes ici juste pour éviter que les gens ne finissent par emporter les quelques accessoires restés dans les hangars», confie l’un des éléments. Interrogés sur la gestion de l’usine, les deux agents optent pour la méfiance. «Si vous voulez des informations, allez voir le chef vigile à l’entrepôt de Ngalan. Ici, nous n’avons aucun contact d’un responsable », avise le même agent. Avant de mettre le cap sur Ngalan, le reporter de Mutations décide d’effectuer un tour éclair dans le complexe.

Le constat est écœurant. Toutes les composantes de l’usine à savoir : le bloc administratif, la chaine d’assemblage des tracteurs, la salle de formation des tractoristes, la cantine et la cabine de peinture sont abandonnés et croupissent dans la broussaille. Le hangar principal qui abritait la chaine d’assemblage des tracteurs, présente un décor plu[1]tôt sinistre. Les restes des tracteurs, des accessoires et quelques pièces détachées sont dissimulés de façon éparse dans le grand hall du gigantesque hangar.

A quelques pas de là, le deuxième plus grand hangar d’entreposage des engins, sert d’abri à une unité de fabrique des pavés. Dans les autres structures, la désolation est pratiquement à son comble. A Ngalan, le site aménagé pour l’entreposage des tracteurs gardé lui aussi par un agent de police, subit également les affres de cet abandon.

Ici, comme à Akak Essatolo, l’un des hangars est transformé en une petite unité d’égrainage du maïs. «On nous dit que ces machines et le maïs appar[1]tiennent à un magistrat. Moi je suis là pour ramasser les déchets», confie une jeune dame surprise en pleine séance d’égrainage de quelques épis à la main. Comme au siège de l’usine, quelques tracteurs et pièces d’attelage sont abandonnés et exposés aux intempéries.

L’agent de police, à l’instar de ses collègues, propose encore une fois pour des besoins d’informations, la consultation du chef vigile resté cependant introuvable. Consultation ou pas, la réalité et la gravité de la situation sautent à l’œil. Le constat qui se dégage d’un côté comme de l’autre, est que l’usine des tracteurs d’Ebolowa est morte de sa belle mort. Tout s’est arrêté après l’assem[1]blage des 1000 premiers tracteurs et leur distribution. Lancé en 2010 dans la perspective du comice agropastoral, ce projet a coûté 18,825 milliards Fcfa au contribuable camerounais.

Il avait pour objectif de mettre à la disposi[1]tion du pays, des équipements permettant la culture du riz à grande échelle. C’est dans cette optique qu’une première convention est signée en avril 2009 à New-Dehli, entre les gouvernements camerounais et indiens, pour la mise en place d’au moins 5000 ha de riz et 5000 ha de maïs.

Les projections faisaient état d’une production annuelle de 100.000 tonnes de maïs et 300.000 tonnes de riz. «En plus de missions de montage, de fabrication et de formation dévolues à cette entreprise, le cahier de charge prévoit la construction de 10 pôles régionaux sur l’ensemble du ter[1]ritoire national, question de rapprocher ces équipements des utilisateurs», déclarait le directeur général de la plani[1]fication au Minepat, par ailleurs coordonnateur du pro[1]gramme riz-manioc, Janvier Oum Eloma.

Tout a pourtant bien commencé. Alors que l’usine est en pleine construction, une deuxième convention est signée le 14 septembre 2012, entre le Minepat et Eximb bank Inde. «Cette deuxième convention qui concerne exclusivement le matériel de génie civil adapté à l’écologie du Cameroun, a pour mission de viabiliser les exploitations, désenclaver les bassins de production et de mieux préparer les sols avant l’arrivée des tracteurs», assurera M. Oum Eloma.

Moins de 10 ans après la signature de la convention en question et la fin de la construction dans la douleur de la chaine de montage des tracteurs, le bilan est sombre et triste. L’usine proprement dite relève d’un passé lointain, les tracteurs sous-exploités se retrouvent cloîtrés derrière les villas de quelques privilégiés ayant bénéficié de cette manne.

Les seigneurs de la terre qui avaient placé leur espoir sur ce projet, sont condamnés à continuer de cultiver avec leurs houes et machettes. Les 2000 emplois directs et 1000 emplois temporaires dont étaient tributaires ce projet, ne sont aujourd’hui qu’une vue de l’esprit pour de nombreux jeunes qui voient ainsi leurs rêves s’envoler.

Démarré sous Emmanuel Nganou Djoumessi, finalisé au plan administratif sous Louis Paul Motaze, le projet semble avoir disparu de la feuille de route du Minepat depuis l’arrivée d’Alamine Ousmane Mey dans ce département ministériel.

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