Pourrait t- on évoquer d’autres statuts pour les artistes, si du point de vue des sciences juridiques, un statut est une loi définissant, règlementant, orientant une activité alors qu’une loi sur les droits d’auteur et son décret d’application existent depuis plus d’une décennie en la république du Cameroun ?
Une interrogation bien motivée face aux différents regards des artistes et des parties prenantes autour de ces derniers, se manifestant par des revendications, des dysfonctionnements, sans oublier des grosses tensions dans cette filière. Quiproquo, imbroglio ou tout simplement une problématique épistémologique à considérer à l’effet de mieux circonscrire les différentes responsabilités.
Artistes, œuvres et droits d’auteur
Se voyant clochardiser et estimant êtreabandonné à eux même, les artistes attribuent leur mal être à l’état et auxadministrateurs des organisations de gestion collectives pour leurs droits communément appelés redevance des droits d’auteur alors qu’en réalité ce serait des droits portant sur les mises à dispositions publiques de leurs œuvres, parmi d’autres droits rattachés à leurs œuvres. L’état devrait, d’après eux : « s’impliquer et sanctionner les administrateurs des OGC mais il est dans la combine en adoubant des personnes à leurs têtes avec lesquels, ils se partagent l’argent des artistes ». Un sujet à caution renvoyant sur la notion des droits d’auteur qui renseignent à suffisance sur les revenus des artistes parce que les artistes gagnent de l’argent via des droits rattachés à leurs œuvres.Il faut dès lors entrevoir ces droitscomme un ensemble d’offres de services que les artistes échangent avec des tiers qui constituent son environnement.Une sorte d’éducation à envisager via des renforcements des capacités, pour un début des solutions face aux différents rôles que joue chaque maillon dans les chaînes des valeurs de chacune des disciplines artistiques.
Droits d’auteurs et Organisations des gestions collectives
En revenant donc sur l’épineux problème des redevances des droits d’auteur, il convient de préciser que dans la norme ce droit se désigne : « droits d’exécutions publiques », pour l’art musical par exemple, et porte sur les mises à dispositions des œuvres aux publics. Par conséquent, tout promoteur des spectacles, radio, télévision, internet, et d’autres lieux publics où on diffuse des musiques tels que les cabarets, restaurant, hôtels… sont tenus de payer des redevances. C’est une obligation civile pour faire valoir ce que droit concernant, une des offres de services mais tacites, parmi tant d’autres qu’offrent les artistes. Une subrogation de la gestion de leurs droits d’exécutions publiques à un organisme de gestion spécialisée. Une sorte de sous-traitance dont les conditions de recouvrements et répartitions entre les membres est règlementé par des statuts.
Une fois constituée telle qu’en est le cas avec la SOCAM, des missions statuaires leurs sont attribuées suivant des statuts adoptés par une assemblée générale constituée en majorité par des auteurs. D’où plusieurs missions de recouvrements de ces droits d’exécutions publiques dans un leadership de traçabilité. Entre autres :
- Les diffusions actives se rapportant aux groupes d’entités faisant des choix d’œuvres par programmation ou autres procédés, à mettre à disposition des publics. On y retrouve les médias, cabarets, promoteurs des spectacles et les établissements disposant des disc-jockeys ou même tout individu diffusant par exemple des musiques sur internet. Ils doivent déclarer les œuvres diffusés via une Play List et payer les redevances y étant associés.
- Les diffusions passives se rapportant aux groupes d’entité qui relaient via une télévision ou une radio. On y retrouve les agences de voyage, les bars, snacks…
Les fonds de roulements de cette institution découlent de ces recouvrements toujours dans le respect des pourcentages à y allouer décidés par l’assemblée générale des auteurs. Le reste fera l’objet des repartions entre artistes au prorata de leurs fréquences de passages en considérant l’ensemble des espaces de diffusion, en se basant sur les listes de diffusion ou Play List, bien évidemment après déductions des charges fiscales dues à l’état.
Une théorie parsemée d’embuches dans la pratique à cause des irresponsabilités et incompétences partagées entre les artistes et les gestionnaires de leurs droits d’exécutions publiques :
- Combien d’artistes et leurs managers savent que tout droit de représentation engagée, à savoir spectacle live ou playback quel qu’en soit le lieu, mariage, concert…, l’emporte obligatoirement sur une redevance du droit d’auteur à payer par le promoteur de l’évènement à la SOCAM ? en se basant donc sur l’année 2024 on verra qu’aucun artiste ainsi que leurs managers ne pourraient opposer des quittances y relatives ;
- Combien de médias déposent des Play List en payant les droits y relatifs en dehors de la chaine nationale de télévision ? ils ont érigé une norme trompeuse sous l’appellation : « promotion »,emmenant les artistes à leur signer des licences de cession des droits de diffusion, d’ailleurs caduques, en plus des frais de promotion pour le passage de l’œuvre concerné plusieurs fois ;
- Combien des membres constitutifs de la SOCAM pourraient opposer une liste officielle des différents lieux de communication aux publics de leurs œuvres, alors qu’en se référant aux ministères du tourisme, par exemple, ils pourront recevoir la liste officielle des établissements conformes ?
Ce triste constat révèle les spoliations des droits de diffusion incorporant les droits d’exécutions publiques des artistes, par les tiers avec leurs propres complicités. Un indicateur de méconnaissance de leurs droits doublé des incompétences de leurs managers, parce qu’aussi longtemps que le secteur des arts existe dans la nation camerounaise, aucune éducation sur les droits rattachés à leurs œuvres ainsi que, leurs valeurs marchandes et matérialisations économiques, n’ont jamais été sérieusement planifiée pourtant bel et bien formalisée de façon hétéroclite par la loi sur les droit et son décret d’application.
Les droits d’auteur ou un ensemble de droits rattachés aux œuvres
Depuis quelques années à l’approche de la journée internationale du 23 Avril portant sur les droits d’auteur, moult actions sont lancées notamment les répartitions des redevances des droits d’auteur ou droits d’exécutions publiques. On y associe également des pamphlets via des slogans aussi bien à l’endroit de l’état, des politiques qu’aux administrateurs des organisations de gestion collectives. Une situation confuse et également indicatrice de ce que les droits d’auteur, dans les consciences camerounaises, se résument aux répartitions, aux politiques culturelles et à la gestion des droits d’exécutions publiques. Des amalgames concernant la journée internationale des droits d’auteur où normalement, on devrait consacrer du temps aux réflexions sur les différents droits d’auteur qui sont en réalité des services qu’offrent les artistes comme matières premières pour servir de fondation aux industries culturelles et créatives.
L’état du Cameroun a fait sa part à travers la loi… et son décret d’application… en adoptant les droits d’auteur. Un paradigme de connotations des différents statuts d’artistes selon qu’on soit interprète ou auteur. Une politique de gouvernance participative invitant autour de la table les acteurs de cette filière pour penser aux structurations de leurs métiers. Une prescription d’une sociologie de l’action visant à respecter les libertés d’expressions, fondamentales et à renforcer les processus démocratiques des gestions des affaires publiques. En somme, les acteurs des industries culturelles et créatives face aux canevas des textes des lois sur les droits d’auteur et son décret d’application doivent eux même organiser et structurer leurs secteurs d’activités. C’est ainsi que la responsabilité de l’état fût de définir les droits d’auteur ou des offres des services des artistes à l’endroit des autres parties prenantes. En prenant exemple sur l’art musical nous distinguons :
- Les droits de reproduction : qui concernent les enregistrements et les copies des œuvres. C’est disons-le, des services que l’artiste musicien offre aux éditeurs ou producteurs de phonogrammes pour des plateformes mécaniques ou numériques contre rémunération ;
- Les droits de représentation : qui concerne les spectacles. Un autre service offert contre un cachet aux producteurs de spectacle;
- Les droits de diffusion : qui concerne la diffusion aux publics des œuvres via, radio, internet, télévision… cesont ces droits qui sont gérés en même temps que les droits d’exécutions publiques par la SOCAM tels que explicité en supra ;
- Les droits de distribution, les droits d’autorisation, de transformation…
Une panoplie de droits justifiant les revenus des artistes dont la matérialisation, la régulation et la codification économique ont déjà été circonscrits par l’état via la loi sur les droits d’auteur, son décret d’application, l’harmonisation des droits des affaires parce que dans le plan comptable en vigueur on peut les comptabiliser, et enfin une prise en comptes des revenus de l’artiste dans le code générale des impôts.
En cette édition de la journée internationale des droits d’auteur 2025, faudrait absolument peut être repensé l’éducation du monde de l’art par le nivellement vers le bas notamment les artistes. Penser à élaborer des programmes de formation pour eux et leurs managers dans une pédagogie inclusive avec l’état. Ceci dans le but de certifier les apprenants qui, en tant que managers des artistes cerneront bien les contours de ce métier. L’artiste a besoin d’être protégé face à ses vrais bourreaux, ceux-là avec lesquels ils échangent et qui les manipulent en faisant croire que son problème c’est l’état. L’art est intelligent, un métier et une profession. Protégeons et aidons à protéger les artistes en les éduquant sur leurs droits qui garantiraient leurs revenus et partant de là, leurs protections sociales, qui devrait être structurée par une participation active des artistes en cotisant via leurs revenus auprès des organismes spécialisés tels que la CNPS ou des compagnies d’assurances.
Yves DouallaMbela alias B@byface
Correspondance particulière