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Bavure à Bamenda : Le Mindef accuse et s’excuse

Un homme a été tué à un poste de contrôle à Bamenda le 4 juillet dernier. L’exploitation de ses documents indique qu’il était un dangereux terroriste. Mais le ministère de la défense parle d’un « incident malheureux »

Dans un communiqué publié le 7 juillet 2021, le capitaine de vaisseau, Cyrille Serge Atonfack Guemo, chef de Division de la communication au ministère de la défense, porte à la connaissance de l’opinion publique que vers 14h 30 au poste de contrôle mixte de Below-Foncha à Bamenda, Ngoran Djibiring Dubila, « pris de panique, a engagé une brutale manœuvre automobile de dérobade, au moment précis où il lui était demandé d’immobiliser son véhicule. Dans sa fuite, il a été stoppé par des tirs de dissuasion qui l’ont malheureusement atteint mortellement…Les premières constatations d’usage, poursuit le communiqué, ont permis d’établir avec certitude que le défunt faisait l’objet d’un mandat d’arrêt délivré le 24 novembre 2020 par le président du tribunal militaire de Bamenda (…) à 3 ans d’emprisonnement ferme (…) pour des faits d’apologie de sécession et menaces sous condition. En outre, il est désormais clairement établi que le nommé Ngoran Ndjibiling Dubila(…) qui prétendait exercer comme homme d’affaires était en réalité le principal relai local et plaque tournante de certains leaders terroristes sécessionnistes de la diaspora dans le secteur de Nkwen. Il avait à son actif plusieurs enlèvements avec demande de rançon, ainsi que de nombreux cas de menaces sous condition». Mais la conclusion du communiqué laisse perplexe : «le ministère de la défense regrette cet incident malheureux et adresse ses condoléances les plus attristées à la famille durement éprouvée». Ce n’est pas tous les jours que le ministère de la défense présente ainsi ses «condoléances les plus attristées» à la famille d’un homme (et leur liste est longue) identifié comme un dangereux terroriste.

Selon les informations de La Nouvelle Expression, cet homme que très peu de gens défendent ouvertement à Bamenda, «était bien connu». Et comme la conclusion du communiqué l’indique, «l’enquête ouverte par les autorités administratives locales et les forces de défense et de sécurité permettra de préciser les contours et les responsabilités de ce malheureux incident». C’est dire que toutes les lumières restent à faire.

Mais nous n’oublions pas d’autres cas que le Cameroun a connus. On se rappelle cette affaire qui avait fortement ému toute la communauté nationale et internationale en août 2018. Une vidéo qui montrait des soldats en train d’exécuter sommairement, et à bout portant, deux femmes et leurs enfants dans la région de l’Extrême nord du Cameroun. L’ancien ministre de la communication et porte-parole du gouvernement, Issa Tchiroma Bakary, était monté au créneau pour crier à un complot des ennemis du Cameroun. Soutenant mordicus que cette scène se passait dans un pays sahélien, en Afrique de l’Ouest. «Il s’agit d’une autre manœuvre de désinformation grossière dont les faits projetés n’ont aucun rapport avec l’action menée par les forces de défense et de sécurité dans le cadre des missions qui leur sont confiées», avait-il déclaré avec assurance. Avant d’ajouter : « les militaires qui sont impliqués dans cette opération présentent visiblement le même phénotype. Or, l’armée camerounaise est une armée nationale qui réunit en son sein toutes les composantes sociologiques de la nation ».

Mais les démentis s’étaient multipliés. Surtout, ces informations précieuses que notre confrère, l’Œil du Sahel, avait données sur le lieu où la tragédie s’était produite : Krawa-Mafa, une bourgade du Mayo Moskota, département du Mayo Tsanaga. La première femme, en rouge, s’appelait Zoumtegui, et la seconde, Kelou Manatsad. Leurs enfants et elles avaient été enterrés au pied de la montagne bien visible dans la vidéo. Une foultitude de preuves fournies par la suite avait obligé le gouvernement camerounais à reconnaitre l’acte horrible de ses hommes. Par la suite, le même Issa Tchiroma Bakary avait signé un communiqué pour indiquer qu’après une enquête prescrite par le chef de l’Etat pour faire la lumière sur ces crimes, sept militaires avaient été mis aux arrêts : le lieutenant de vaisseau Fobassou Etienne, le sergent-chef Bytila Cyriaque Hilaire, le caporal Godwe Mana Didier Jeannot, le caporal Tsanga, le soldat de deuxième classe Dossou Barnabas, le soldat de première classe Ntiche Fewou Ghyslain, le soldat de deuxième classe Manasse Jacobaï Jonathan.

Ensuite est venu le cas du massacre de Ngarbuh dans le département du Donga Mantung au Nord-ouest, le 14 février 2020. Les informations des sources indépendantes, des organisations de la société civile nationale et internationale, des institutions du système des Nations Unies, des évêques dans le Nord-ouest, étaient d’accord dans leurs rapports respectifs que ce sont les éléments des forces de défense camerounaises qui étaient à l’origine des tueries de Ngarbuh. Et tous étaient unanimes sur le chiffre de plus de 20 morts. C’est près de 48h après la survenue de ces événements que le chef de division de la communication au ministère délégué à la présidence de la république chargé de la défense, Serge Cyrille Atonfack Guemo, avait publié un communiqué le 17 février 2020 pour donner la version de l’armée, reconnaissant une opération des forces de l’ordre dans un repère des terroristes dont les dégâts collatéraux avait fait 5 morts dont 4 enfants et une femme, et 7 terroristes neutralisés. Le même jour, le ministre délégué à la présidence de la République chargé de la défense, Joseph Beti Assomo, dans son communiqué, allait reprendre presque les mêmes informations, sans être aussi affirmatif que le chef de la division de la communication, mais avec cette nouveauté qu’il avait prescrit une enquête concomitamment menée par la gendarmerie et la sécurité militaire. Le ministre de la communication et porte-parole du gouvernement, René Emmanuel Sadi, dans sa sortie 48h plus tard, allait s’arc-bouter aussi sur le nombre de morts avancé par le Mindef.

 

 

La Nouvelle Expression