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Sommet Afrique -France : La rupture dans l’inefficacité ?

Selon plusieurs médias, la rencontre de Montpelier était tournée vers les acteurs du changement (entrepreneurs, intellectuels, chercheurs, artistes, sportifs, créateurs, influenceurs etc). On apprendra qu’elle voulait questionner et redéfinir les fondamentaux de la relation entre la France et le continent africain. Malgré ce changement de paradigme que l’on a pu observer, des voix continuent de se lever en Afrique pour montrer les limites de ce sommet …

Le vendredi 08 octobre 2021 sera inscrit dans les annales des multiples sommets organisés par la France en direction de l’Afrique. La principale innovation ici reste la participation inédite de la jeunesse africaine triée par des méthodes uniques des services de protocole de l’Elysée dont le casting a semblé avoir un effet boomerang dans les rues des villes africaines connectées aux médias français. Tous les groupes whatsapp ont pu recevoir au moins un extrait des multiples interventions des jeunes africains. La sélection de ces jeunes qui ont intervenu fut l’œuvre du Camerounais Achille Mbembe autrefois réputé pour ses prises de position énergiques contre la politique française en direction de l’Afrique. D’une façon rusée et stratégique c’est lui qu’Emmanuel Macron choisira pour sonder les Africains sur la nouvelle donne à construire entre la France et l’Afrique. C’est d’ailleurs ce qui expliquera sa présence remarquable lors de ce somment.

Selon plusieurs médias, la rencontre de Montpelier était tournée vers les acteurs du changement (entrepreneurs, intellectuels, chercheurs, artistes, sportifs, créateurs, influenceurs etc). On apprendra que le Sommet Afrique-France voulait questionner et redéfinir les fondamentaux de la relation entre la France et le continent africain en écoutant la jeunesse, en répondant à ses interrogations et en créant un nouvel espace de dialogue orienté vers l’avenir. Malgré ce changement de paradigme que l’on a pu observer, des voix continuent de se lever en Afrique pour montrer les limites de ce sommet avec en toile de fond l’absence remarquée des chefs d’Etat africains principaux décideurs actuels de l’Afrique.

Marquons un petit temps d’arrêt dans les principes et les objectifs des traditionnels France Afrique :

Le premier sommet se tient à l'Élysée le 13 novembre 1973, à l'initiative du président nigérien Hamani Diori, sous la présidence de Georges Pompidou, en présence de 10 délégations de pays africains. En effet, depuis cette date, nous pouvons noter que 03 sommets ont été déterminant pour le devenir de l’Afrique :

Les 19 au 21 juin 1990 à La Baule, « conférence des chefs d’État d’Afrique et de France » où François Mitterrand prononce, le 20 juin, le fameux discours dit « de la Baule » qui annonce le conditionnement de l'aide publique au développement à la démocratisation et à la bonne gouvernance. Ce sommet a eu le mérite d’avoir poser les bases d’une ouverture dans les jeux politiques, la légalisation des syndicats, le multipartisme fera ses marques. Au Cameroun, la Loi N° 90/53 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association va provoquer la création de nombreuses associations ouvrant ainsi la voie aux organisations de la société civile (OSC) et aux nombreuses églises de réveille dont la présence dominante devient gênante pour les autorités camerounaises aujourd’hui.

Les 6 et 7 décembre 2013 à Paris le premier et le dernier sommet de François Hollande sous le nom de « sommet pour la paix et sécurité en Afrique ». C’est le tournant décisif qui va poser les bases véritables d’un ralentissement de la très grande puissance jadis de ce sommet. Le format est autres, les orientations également. D’ailleurs, François Hollande avait annoncé dès sa prise de pouvoir, l'établissement d'une « nouvelle donne ». Il avait alors dit que la France continuerait d'être présente en Afrique mais adopterait une approche différente de celle du passé. C’est cette ambition de nouer une nouvelle relation avec l’Afrique qui sera certainement à la base du changement sémantique qu’avait subi à cette époque le traditionnel ministère de la coopération qui fut réduit à un simple Secrétariat d'État auprès du ministère des Affaires étrangères et du Développement international, chargé du Développement et de la Francophonie.

Les 7 et 9 octobre 2021 à Montpellier (sera le premier Sommet de Emmanuel Macron sous le nom de « Changer les villes pour changer la vie ». Il s’agissait précisément du 28e sommet Afrique France, où nous avons remarqué que la sémantique traditionnelle a changé, il s’agit désormais de l’Afrique -France et non plus de la France -Afrique. Ce sommet qui s’est tenu le 8 octobre à Montpellier a été un rendez-vous qui a eu le mérite de rompre avec le passé selon Paris. Aucun chef d'Etat africain n'a été invité. Le président français Emmanuel Macron a certainement voulu privilégier un dialogue avec la jeunesse africaine et de la diaspora pour aborder des sujets sensibles des rapports entre l’Afrique et la France au moment où les voix s’élèvent pour manifester un sentiment antifrançais en Afrique.

Oui, apparemment les débats ont été houleux mais surtout passionnants pendant les échanges entre le Président Français Emmanuel Macron et de nombreux jeunes africains. Il ne serait pas superflu de constater que les interventions de ces jeunes n’avaient rien de nouveau, car ces jeunes n’ont fait que redire ce qui est dit par de nombreux africains. On va rapidement constater que la passion juvénile de ces  jeunes prendra le dessus sur les échanges : la plus remarquable restera l’intervention de la jeune malienne qui a démontré sans ambages que les interventions militaires n’ont jamais apporté une solution face une crise en l’occurrence celles des armées françaises pour parler de son pays : Le mali. Certes, la consistance des propos tenus par ces jeunes ont entrainé une valse d’applaudissement mais n’ont pas pu ébranler le Président Français qui avait une très bonne maîtrise des sujets abordés pendant ces échanges. Ce qui a alors trahi le casting qui aurait été fait bien avant.

A quoi sert un sommet sur l’Afrique en l’absence des décideurs africains que sont les Chefs d’Etats ?

La société civile a été invitée sur la table de ces échanges. Certes, elle fait partie des acteurs non étatiques pour le développement mais dispose des moyens très limités et est astreinte à coopérer avec l’Etat. Ce qui rend alors l’Etat incontournable. Le député français Sébastien Nadot le dénonçait déjà dans un communiqué rendu public le 8 octobre 2021, premier jour du sommet où il indiquait clairement qu’Emmanuel Macron se prenait pour le président des Africains, en l’absence des Chefs d’Etat. De nombreux jeunes invités à ces échanges peuvent-ils participer au développement de l’Afrique ? Beaucoup de doute peuvent être émis à ce sujet, car les jeunes invités à ces échanges sont majoritairement hors des réalités de l’Afrique. Où étaient passés les jeunes connus pour leur combat pour la liberté et la démocratie ? Emmanuel Macron a ignoré que la jeunesse Africaine de demain est déjà inscrite dans des grandes écoles : Ecole Nationale d’Administration et de Magistrature, Ecole Militaire Interarmées (EMIA), Ecole Supérieure de Police (ESP) pour le cas du Cameroun. Des écoles réservées désormais aux enfants des hommes du pouvoir. Il est évident que pour espérer le changement de demain c’est par ce type de jeunes qu’il faut désormais passer à défaut d’inviter leurs parents Chefs d’Etat.

Le casting des intervenants durant les échanges pendant ce sommet a été médiocre, ce qui laisse croire qu’il s’est agi beaucoup plus d’un sommet de séduction qu’un sommet tendant à apporter des solutions idoines face aux problèmes africains. Le changement de paradigme observé ne peut rien apporter de concret au devenir de l’Afrique. Il important pour les Africains de comprendre que la France à elle seule ne saurait se constituer comme seule actrice capable de donner des orientations et des stratégies pour des solutions durables et définitive pour l’Afrique et que l’avenir de l’Afrique doit se décider en Afrique.

 

Par Fleury Steve ESSIANE,

Consultant en mobilisation sociale,

Management des projets et Programmes

de développement.