Kamto s’insurge : « 700 milliards perdus pour des rails obsolètes »

Maurice Kamto dénonce la construction du hub ferroviaire de Makor selon des normes obsolètes, avec un écartement métrique dépassé.

Il critique un choix technique qui perpétue le sous-développement ferroviaire du Cameroun et ruine les espoirs de modernisation réelle.

Pour lui, investir dans des infrastructures non conformes aux standards mondiaux revient à hypothéquer l’avenir économique du pays.

DÉCLARATION AU SUJET DE LA CONSTRUCTION DU HUB FERROVIAIRE DE MAKOR ET DE LA RÉHABILITATION DE CERTAINS TRONÇON DU CHEMIN DE FER TRANSCAMEROUNAIS.

 L’Etat du Cameroun a accordé, depuis février 2025, à la société australienne Canyon Resources Ltd, concessionnaire de la mine de bauxite de Minim-Martap dans la région de l’Adamaoua, l’autorisation de construire le hub ferroviaire de Makor. Ce hub devrait permettre de relier la zone d’exploitation du minerai de bauxite au réseau national de chemin de fer, en l’occurrence la ligne Yaoundé-Ngaoundéré, et ainsi faciliter son transport vers les ports sur le littoral camerounais. Le réseau ferroviaire camerounais, réalisé principalement par l’Allemagne et la France avant l’indépendance, uniquement pour l’évacuation des richesses du Cameroun sous domination vers le port d’embarquement, a un écartement métrique d’un mètre (1m) seulement entre les rails. Ce réseau ferroviaire accuse un retard considérable sur le développement général des voies ferrées depuis l’époque de sa réalisation. En effet, environ 60 % des chemins de fer dans le monde utilisent aujourd’hui la voie standard avec un écartement des rails de 1,435 m. D’autres types de voies existent, notamment la voie russe (1,520 mm) utilisée en Russie et dans plusieurs pays de l’ancienne URSS, et la voie large (1,668 m) usitée en Espagne et au Portugal. Ces voies consacrent l’évolution des voies ferrées en rapport avec celles des locomotives et wagons, dont le développement  permet d’aller toujours plus vite, plus loin et en transportant plus de passagers et de marchandises. Car ces voies plus larges assurent une plus grande stabilité des trains.

Aussi, signer en 2025 un contrat pour perpétuer la construction d’un chemin de fer aux normes largement dépassées traduit-il une volonté manifeste de nuire à l’économie du Cameroun et de maintenir notre pays dans un état d’arriération, avec des infrastructures obsolètes. La privatisation de la REGIFERCAM en 1999, qui change son appellation en CAMRAIL, a suscité beaucoup d’espoir de développement et de modernisation de réseau ferroviaire national. Malheureusement, au bout du compte, l’état du Cameroun a constaté de lui-même que les engagements d’investissements de l’entreprise bénéficiaire de la privatisation n’ont jamais été tenus, et, pire encore, des problèmes d’entretien et de sécurité du réseau ont débouché sur de accidents graves, dont la catastrophe d’Eséka de 2016. La position stratégique du Cameroun, avec sa bordure côtière, lui offre l’opportunité de pouvoir desservir les pays continentaux voisins, principalement à travers un réseau moderne de chemins de fer, construit sur le modèle de la voie standard. Une ligne Transcamerounaise qui traverse le pays du sud au nord et joint toutes les régions tout en débouchant sur les principales villes frontalières est une assurance de recettes étatiques qui peuvent par ailleurs être mobilisées pour la réalisation d’autres infrastructures de transport telles que les autoroutes. La rénovation actuelle du réseau par CAMRAIL qui ne réalise pas l’écartement des rails au niveau des standards mondiaux constitue une perte sèche pour l’économie camerounaise qui est chaque fois obligée d’acheter des locomotives et des wagons hors d’usage dans les pays fournisseurs, qu’ils soient européens ou asiatiques. L’entretien de ce matériel obsolète repeint pour l’occasion, est rendu difficile et coûteux du fait de l’indisponibilité des technologies qui étaient pertinentes au moment de leur fabrication. Ce sont ainsi environ 700 milliards FCFA qui ont été engloutis dans le renouvellement de 550 km de voies (dont seuls 175 km sont entièrement refaits actuellement) et l’achat du matériel roulant dans  les garages des pays fournisseurs. Ce montant aurait pu permettre, avec une bonne gouvernance, de renouveler au moins les 3/4 du Transcamerounais avec des rails aux normes standards de 1,435m et avec des trains modernes.

Nous dénonçons fermement le choix fait, notamment pour la réalisation du hub ferroviaire de Makor  qui est sur le point d’être construit par Canyon Resources Ltd, conservant un modèle archaïque de voie ferrée qu’il faudra démanteler pour arrimer le Cameroun aux standards mondiaux en la matière. Il s’agit-là d’une manière d’hypothéquer la modernisation des infrastructures du pays par un choix qui coûtera au contribuable camerounais déjà oppressé par d’autres choix d’investissement irréfléchis et diverses dépenses irrationnelles du pouvoir en place. La construction du hub de Makor et le renouvellement annoncé de deux tronçons de la ligne Douala-Ngoundéré sont une belle occasion pour reconstruire les réseaux de notre pays. Il convient de revoir les choix faits à cet égard avant qu’il ne soit trop tard.

Maurice KAMTO

Candidat à l’élection présidentielle de 2025

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