Dans cette communication, l’universitaire et homme politique Vincent Sosthène Fouda pense que le décès de cette figure importante de la politique va au-delà des frontières camerounaises en termes de choc et d’amertume.
« L’onde de choc provoquée par la disparition d’Anicet Ekané dépasse les frontières du Cameroun, dépasse même celles de l’Afrique.
Elle ne tient pas seulement à la stature de l’homme — nationaliste, penseur, militant — mais à la manière dont il a été arraché à la vie, dans la solitude d’une détention, loin des siens, privé de l’ultime chaleur d’un regard, d’une main, d’un adieu.
Ce n’est pas seulement une mort. C’est une dépossession. Une négation de l’humanité dans ce qu’elle a de plus essentiel : la relation à l’autre, le visage de l’autre.
Emmanuel Levinas écrivait dans l’époque qui est la nôtre que :
« Le visage de l’autre m’ordonne. »
Il nous rappelle que l’éthique commence là, dans la reconnaissance de l’autre comme visage, comme altérité irréductible, comme appel à la responsabilité.
Priver un homme de ses derniers instants avec son épouse, ses enfants, ses petits-enfants, ce n’est pas seulement une faute administrative.
C’est une blessure faite à l’humanité elle-même. C’est refuser de voir dans l’autre un visage, et donc une dignité. C’est, au fond, une forme de cruauté froide, bureaucratique, qui trahit l’essence même de la civilisation. De la Méchanceté gratuite pour employer un langage commun à tous.
Un État peut être fort sans être brutal. Il peut être ferme sans être inhumain. Il peut être souverain sans être sourd à la douleur.
Ce que nous attendons d’un pouvoir, ce n’est pas qu’il se justifie par des communiqués, mais qu’il se tienne à la hauteur de l’homme. Car c’est là que se joue la grandeur d’une nation : dans sa capacité à honorer ses morts, à entourer ses vivants, à reconnaître dans chaque citoyen, fût-il dissident, un frère en humanité.
Il est encore temps, pour ceux qui gouvernent, de choisir la voie de la dignité. Car l’histoire, elle, n’oublie pas. »





