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Michel Tjade Eone : la plume cassée d’un érudit

Cet universitaire enseignant-chercheur qui a achevé son initiation à la dignité de « Mbombog » il y a quatre ans, a raccroché sa toge la semaine dernière. Il tire la révérence à 71 ans dans son domicile sis à Essos à Yaoundé, des suites d’un accident vasculo-cardiaque.

Le jeudi 16 avril 2021, la famille universitaire camerounaise a perdu un de ses maitres, particulièrement dans le domaine des sciences de la communication. En quittant ce monde, Michel Tjadè Eonè, l’ancien directeur-adjoint chargé des programmes et créateur de la Fm 94 à la Crtv après les rites d’initiation à la rationalité du «Mbog» et rituel d’élévation publique à la dignité de « Mbombog ». Après avoir laissé le micro en 1980, le grand journaliste se consacre de nouveau aux études à l’Université Pan-théon-Assas de Paris II. Une université où il obtient quatre ans après son doctorat de 3e cycle en sciences de l’information et de la communication.

Pour Pierre Titi Nwel, membre du collège de la vingtaine de «Mbombog» initiateurs de Michel Tjadè Eonè, «Tjadè Eonè ‘ est dans la lignée du Mbog, c’est un travailleur acharné et il a manifesté le désir d’être Mbombog. Il a été initié au dernier degré du Mbog et c’est maintenant que son initiation au mbog commence parce qu’il est devenu Mbombog». Ceux qui le connaissaient dans un affuble-ment essentiellement constitué de costumes, ont dû s’adapter à le voir s’accommoder à ses nouvelles tenues et attributs constitués de chemise, un petit chapeau noir qui laisse entrevoir une plume, une étoffe de tissu attachée à la taille et une canne.

Aspiration à l’émergence

«Je démarre une initiation à 67 ans. Un apprentissage nouveau dans une autre discipline qui est une discipline d’essence traditionnelle pour me laisser initier dans une rationalité qui est la rationalité du Mbog. Je poursuis ma carrière de chercheur mais, je la poursuis autrement en me donnant comme champ de recherche la tradition africaine, camerounaise et Basa’a. Je prétends que si nous voulons émerger, notre aspiration à l’émergence doit.se fonder profondément dans notre terroir et notre culture. Et, pour qu’il en soit ainsi) il faut que nous,.chercheurs nous découvrions véritablement les ressorts de notre culture car aucune nation ne peut s’émanciper à partir des valeurs d’emprunt ou d’autrui», disait-il quelques jours avant l’achèvement de son initiation comme «Mbombog».

Son cursus académique précurseur d’une vie de piété l’aura conduit tour à tour au Petit Séminaire Saint Dominique Savio (Bonepoupa), Saint Albert (Bafang) et Sainte Thérèse de Mvolye à Yaoundé.

Malheureusement le sentier de prélat ne sera pas aussi lumineux que celui du micro. Après son baccalauréat A4, il intègre l’Université de Yaoundé et fait partie de la 2ème promotion de l’École Supérieure Internationale de Journalisme de Yaoundé (Esijy). Il a publié de nombreux ouvrages, tous orientés vers son domaine de prédilection, la communication. Entre 1989 et 1993, il a été directeur-adjoint chargé des études à l’École supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication (Esstic).

Les promotions académiques se succèdent dans la vie du champion national, vétéran de ping-pong (tennis de table) en 1998 avec à la clé l’adoubement comme membre titulaire de l’Académie des sciences du Cameroun, le 12 décembre 2011. Le jeune «Mbombog» qu’il aura été a aussi présidé aux destinées de «Equateur Media Group» à Douala de 1994 à 1996.

Entre 1996 et 1998, il était administrateur-chargé de la mise en œuvre des programmes de communication de l’Unesco dans tous les pays de l’Afrique de l’Ouest et du Centre (Bureau régional de Yaoundé). Puis il occupa le poste de directeur-adjoint de l’Ecole doctorale science politique, relations internationales et communication de l’université de Yaoundé II, de 2004 à 2015.

Théories et pratiques

Pour l’universitaire et enseignant Daniel Anicet Noah, qui l’a côtoyé pendant de nombreuses années, «sur le plan professionnel, c’était un grand collaborateur à la radio pendant une dizaine d’années et un grand journaliste. Il a animé une des émissions phares de la Crtv (Entretien) à Garoua à une certaine époque. Il était un homme très organisé et rigoureux dans tout ce qu’il faisait. Sur le plan académique, il a la maîtrise des théories et les pratiques de la communication et nous avons ensemble travaillé pour que ces théories soient transmises aux jeunes générations. Il était perfectionniste ainsi que très attaché à la morale et à l’éthique. Je crois que les étudiants qu’il encadrait ont perdu un guide».

Pendant pratiquement cette même période (2005-2015), il aura été chef de département radio à l’Ecole supérieure des sciences été techniques de l’information et de la communication (Esstic) de l’Université de Yaoundé II avant de prendre sa retraite comme professeur des universités. Il a été entre 2005 et 2015, chef de division de la recherche, des publications et du développement et chef de division de la coopération universitaire au rectorat de l’université de Yaoundé I. Ses deux dernières années dans l’administration, il a été directeur de la recherche et de la coopération universitaires au ministère de l’Enseignement supérieur (Minesup).

Après l’obtention de son probatoire A4 en 1970 et du baccalauréat A2 en 1971, tous avec des mentions Assez Bien, il entre à l’Ecole supérieure internationale de journalisme de Yaoundé (Esijy) et en ressort nanti d’un diplôme supérieur de journalisme en 1974. Entre 1980 et 1984, il obtient son doctorat de 3ème cycle en sciences de l’information et de la communication, option : Sociologie de la Communication, à l’université Panthéon-Assas de Paris 2. En 1979, il sera élevé au titre de Chevalier de l’Ordre d’Orange-Nassau du royaume des Pays-Bas.

Source: Essingan