Ouandié et les divisions ethniques: Le cri du magistrat Ulrich Ongolo

Le magistrat Ulrich Xavier Ongolo réagit aux récentes déclarations d’Elimbi Lobe, qui a qualifié Ernest Ouandié de « grand bandit ». L’autorité judicaire dénonce l’hypocrisie qui entoure ce débat et critique ceux qui, tout en brandissant la loi pour défendre Ernest Ouandié, remettent en cause l’autorité de l’État dans d’autres contextes. Magistrat de 1er grade, Major de la promotion « Justice et intégration régionale » de l’ENAM au Cameroun, Ulrich Xavier Ondoua appelle à une réflexion collective sur l’histoire du Cameroun, loin des clivages ethniques, et plaide pour un débat constructif sur les enjeux nationaux, afin d’éviter la polarisation qui nuit à l’unité du pays.

 

Lire le texte de Ulrich Xavier Ovono Ondoua :

Depuis quelques jours, les propos de Monsieur Elimbi Lobe, j’ai envie de dire encore lui, agitent l’attention publique. Il a déclaré qu’Ernest Ouandié était un grand bandit.

Depuis cette sortie d’une légèreté blâmable, les fanatiques sont de sortie.

Les premiers, pour dénoncer l’horreur de l’association du nom du Camarade Émile à toute entreprise de gangstérisme. Pour conforter leur position, ils trouvent refuge dans la loi et le décret de 1991 faisant de ce dernier une grande figure de l’histoire. Au secours de cette thèse, une historienne camerounaise soutient que lors des travaux sur la rédaction du rapport relatif à la décolonisation au Cameroun, aucune trace d’activité criminelle imputée à Ernest Ouandié n’a été répertoriée.

Les autres, agitent la mémoire tenace et vive des populations du Moungo qui se souviennent d’exactions commises par « l’armée » du défunt Ouandié Ernest. A grands renforts de soutien, ils évoquent une interview du General Semengue, encore vivant, et témoin privilégié de cette époque où il dirigeait les opérations en vue de la mise sous cloche de ce que l’on nommait alors le maquis.

Le décor est planté, non sans hilarité.

Qu’observe t-on ?

Ceux qui soutiennent le caractère à la limite sacré de la figure de Ouandié trouve refuge dans la loi. Les tenants de cette posture sont les mêmes qui, à longueur de journée, critiquent ouvertement les lois de la République pour en dire le moins. Nous dirons donc merci à Ernest Ouandié qui, outre tombe, a réussi à rappeler à la conscience collective, l’importance de la loi et la nécessité de la respecter. Alléluia

Les autres, qui viennent au secours de la culture mémorielle et minimise l’impact de la loi qu’ils proposent de restituer dans un contexte national d’apaisement en pleine année de braise (1991) sont ceux qui chaque jour, rappelle le caractère sacré de la loi qui traduit la force de l’Etat. Ils disent d’ailleurs que l’Etat est fort et à ce titre, il doit faire respecter la loi à tout prix. Merci à Ernest Ouandié qui, d’outre tombe, nous a révélé qu’une loi doit être comprise en fonction de son contexte.

Le grand bal des hypocrites est donc ouvert…

Cette hypocrisie en trompe l’œil ne peut taire la réalité de cette querelle. D’une part, on a une volonté affichée de démontrer que les bamiléké sont, au Cameroun, des éternelles victimes de l’histoire et d’autre part, il est question de démontrer qu’ils sont en réalité les bourreaux de notre pays. À ce jeu tout passe. On ressort les documents historiques, les récits oubliés, les détresses, les accusations anciennes et même la fabrique de l’histoire. Cela est d’une tristesse immonde.

Il existe plus d’une centaine de tribus au Cameroun. Il faut avoir du respect pour l’ensemble de ces communautés. La polarisation du débat autour des bamileke, fang beti et sawa est une injure aux autres communautés. Il n’y a pas que ces trois tribus dans ce pays. Il faut cesser avec cette manipulation. Il y a bien d’autres groupes ethniques dans ce pays qui ne nous empoisonnent pas la vie nationale avec un débat mortifère. Le plus drôle est que cette frange silencieuse est majoritaire de telle sorte qu’excédée par ce climat anxiogène organisé à dessein, elle peut décider elle aussi de réagir. Il faut en avoir conscience et prendre garde.

Ultimement, c’est le lieu de rappeler qu’il y a quelques mois, une empoignade intellectuelle opposait deux éminences de la pensée dans notre pays. Ils se discutaient la place de l’Egyptologie dans les savoirs mondiaux. Voici donc un sujet Camerouno Camerounais. Nous voulons un débat entre universitaires sur cette question essentielle de notre histoire ayant des relents dans notre vie nationale actuelle. Je serai heureux d’en être le modérateur.

Sortons des soliloques et des monologues. Construisons un débat sain et utile pour la postérité. Il faut que cesse cette violence ethnicisée. Nous devons assumer notre histoire avec sa part d’ombres et de lumière. Que cette séquence Ouandié sonne le crépuscule de l’Outrance.

Il faut cesser avec ce tribalisme de rente qui prend toujours du relief en année électorale. Chacun venant défendre ses intérêts bassement égoïstes. Nous ne sommes pas dupes. Nous vous voyons. Et le peuple camerounais, vigilant et dégoûté par ces manigances non éthiques, oppose toujours une troisième voie à tous ces projets. Il s’abstient. Écoutez le message dissimulé derrière cette forte abstention.

Nous avons un pays à construire et non une guerre communautaire à entretenir

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