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Emeutes de Sangmélima : la réaction du Sultan Roi des Bamoun

Sultan Roi des Bamoun

Les agences de voyages ont enregistré des départs massifs des membres de cette communauté depuis samedi, 12 octobre dernier.

Les agences de voyages de la ville de Sangmélima ont connu une activité intense depuis samedi, 12 octobre dernier. Plusieurs ressortissants du département du Noun, ayant emprunté des autobus en quittant la ville de Sangmélima. Des familles entières. Hommes, femmes et enfants. Comme bagages, des motos, et matelas et plusieurs valises. Ces départs massifs ont surtout été constatés dans la journée du samedi 12 octobre et celle du dimanche 13 octobre en matinée.

A en croire Aboubakar Mbouobouo, chef de la communauté bamoun à Sangmélima, d’autres départs sont encore en vue. Et ce, en dépit de l’appel à la paix lancé samedi matin par Louis Paul Motaze, élite du Dja et Lobo qui a tenu une réunion en sa résidence avec les leaders de la communauté bamoun pour les rassurer quant à leur sécurité à Sangmélima.

Une sécurité du moins, renforcée depuis jeudi,10 octobre 2019, deuxième jour des émeutes avec un renfort venu de Yaoundé et Ebolowa pour sécuriser les personnes et les biens. A leur arrivée dans la ville, les forces de sécurité ont levé des barricades dans la ville et se sont interposées entre les deux communautés en conflit qui se regardaient en chiens de faïence.

Dans les quartiers, au marché central et dans plusieurs carrefours, des patrouilles sont permanentes. La ville est bouclée et il faut montrer patte blanche pour se déplacer. Au sein de la population, l’on sent encore de l’électricité dans l’air, notamment dans les conversations.

Samedi, 12 octobre 2019 au marché central, l’on pouvait encore voir plusieurs magasins pillés ou vandalisés. A la boutique de Mbouobouo Aboubakar, en face du poste de police, c’est le deuil. Le chef de la communauté bamoun est en train d’évaluer les pertes et ne cesse de secouer la tête, « qu’est-ce que moi j’ai fait à ces gens ? Ne suis-je pas aussi un fils de Sangmélima ? Plus de 20 ans que je vis ici ? », se lamente-t-il.

A l’entrée du marché central, l’impact du feu. Comme s’il y’a eu incendie à cet endroit. Dans la nuit de vendredi à samedi et celle de samedi à dimanche, la ville semble reprendre sa vie normale. Bien que plusieurs noctambules hésitent encore à sortir. Il y’en a néanmoins qui bravent la peur et se rendent à Akôn, épicentre de l’ambiance chaque soir à Sangmélima.

Les débits de boisson sont ouverts, des snacks et les boites de nuit, mais l’affluence est moindre que les jours ayant précédé les fâcheux événements de Sangmélima. Là-bas, si l’on n’enregistre pas encore une flambée des produits brassicoles, la principale difficulté pour les visiteurs consiste à se nourrir.

La ville n’ayant pas été approvisionné en vivres frais pendant les trois jours de conflit. C’est ainsi qu’il n’est pas rare de trouver les forces de sécurité et les autres visiteurs venus dans la ville se bousculer sur une marmite de nourriture en vente.

Ajouté à ce problème de famine dans la ville, il y’a encore le sempiternelle problème de coupure d’électricité. Vivre dans l’obscurité en plein insécurité ! Telle est le calvaire que vivent actuellement les populations de la ville de Sangmélima au lendemain du conflit communautaire entre bulu et bamoun.

Message du Sultan Déjà, le malaise était perceptible vendredi, 11 octobre dernier à la permanence du Rdpc de Sangmélima au cours de la lecture du message du sultan Ibrahim Mbombo Njoya, roi des bamoun par ses émissaires.

Une clameur étant montée de la foule au moment où, lisant le message de son roi, le colonel Nji Pochinto Issah, chef de la délégation dépêchée par le sultan, aborde la partie où il dit, « le sultan m’a chargé de dire aux enfants du Noun vivant dans le Dja et Lobo de comprendre que le Cameroun que nous appelons tous de nos voeux, terre d’accueil, terre de paix est une symbiose qui n’appartient à personne. C’est la terre à tout le monde, finalement, la terre n’appartient à personne ».

Réponse du berger à la bergère, sa majesté René Désiré Effa, président du conseil des chefs traditionnels du Sud lors de sa prise de parole s’est lâché, « nous avons noté tout à l’heure au cours des prises de parole des différentes communautés que seuls les représentants de la communauté bamoun se sont adressés à nous avec beaucoup d’arrogance et d’insolence. Nous vivons bien avec toutes les communautés, mais il faut que ces communautés apprennent à nous respecter». Il a poursuivi, « je crois que nous avons fait le tour de toutes les régions, nous savons comment ça se passe. Nous savons comment on parle aux autres de ce côté-là. Mais vous voyez comment est-ce qu’on parle aux populations du Sud ? Aux responsables du Sud ? Aux enfants du Sud ? Aux chefs du Sud ? Je crois que lorsque vous êtes dans le Noun, quand le sultan Mbombo Njoya se lève, il n’y a pas une mouche qui passe à côté. Pourquoi est-ce que vous pensez que ça doit être différent ici chez nous ? Nous avons aussi des chefs supérieurs qui méritent du respect. C’est de ça qu’il est question. L’arrogance, l’insolence ».

Vendeurs d’oeufs

S’adressant ensuite à l’émissaire du sultan, le chef supérieur du Sud lui a demandé de rendre fidèlement compte au roi des bamoun de ce message et lui dire que, « déjà dans cette même région, c’est la troisième fois. Dans un premier temps c’était à Kyé-ossi, le sultan est venu. Dans un deuxième temps, c’était à Ebolowa, il était également descendu. Cette fois-ci nous sommes à Sangmélima dans le Dja et Lobo. Je crois qu’il y’a un problème. Le président du conseil des chefs traditionnels du Sud, sa majesté René Désiré Effa, qu’il connait très bien, souhaite qu’on se rencontre, qu’on se retrouve et qu’on rassemble nos enfants et qu’ensemble on puisse leur prodiguer des conseils ».

La partie bamoun pour sa part se plaint, « d’être souvent victime des accusations parfois non fondées dans toutes les infractions commises dans le département du Dja et Lobo. Ceci, comme pour ce dernier cas où un bulu assassine un mototaximan bulu, mais on accuse un bamoun », a relayé Aboubakar Mbouobouo, chef de cette communauté à Sangmélima.

Outre les communautés bulu et bamoun, plusieurs autres communautés ont également pris la parole au cours de ce dialogue organisé et présidé par le gouverneur de la région du Sud. C’était le cas d’Etienne Tanefo, chef de la communauté des Bamboutos et représentant du chef de la communauté de l’Ouest souffrant. Dans sa prise de parole, il a déploré le fait que, « les biens de certains membres de la communauté bamiléké aient également été pillés ou vandalisés alors que nous sommes établis à Sangmélima depuis de longues dates. Nous vivons en parfaite harmonie avec les autres communautés et même, certains d’entre nous avons pris femmes parmi les filles bulu et de ces unions sont nés plusieurs enfants ».

Le représentant du chef de la communauté bamiléké a terminé par cette confidence qui a provoqué des éclats de rires, « le bamiléké est un vendeur d’oeuf. Et chaque fois qu’il veut faire quelque chose, il a peur que son oeuf se casse. Donc un bamiléké, un vrai ne fait pas le désordre ».

D’autres chefs de communautés à l’instar des haoussas, étons, mbamois et anglophones ont également pris la parole pour magnifier le vivre ensemble dans la paix à Sangmélima. Plusieurs élites de la région du Sud ont également répondu présent à l’invitation du gouverneur. Jacques Fame Ndongo, Elanga Obam, Nkotto Emane, Remy ZeMeka, Jean Jacques Ndoudoumou, pour ne citer que ceux-là.

Louis Paul Motaze absent ce jour, est arrivé à Sangmélima le lendemain où il a tenu une séance de travail avec les leaders de la communauté bamoun à Sangmélima. Au cours de la prise de parole de Jacques Fame Ndongo vendredi dernier pour essayer d’apaiser les populations en colère, il leur demande s’il est normal que les troubles proviennent du village du chef de l’Etat ? Réponse de la foule en coeur, « oui !!!! Nous souffrons. On manque d’emploi, est-ce qu’on va envoyer nos enfants à l’université sans argent ? ».

Lorsque Jacques Fame Ndongo reprend la parole pour essayer de les persuader, il est interrompu par une coupure brusque d’électricité. Le micro ne fonctionnant plus faute d’énergie électrique. Les gens commencent à sortir de la salle. C’est le chahut.Certains faisant observer qu’il est bon que ces élites vivent l’enfer des coupures d’électricité qui sévit ici à Sangmélima alors même que l’un des leurs à savoir le Chef de l’Etat est au pouvoir.

 

Source: Le Jour No 3029