«Un homme d’une grande simplicité », maitre Emmanuel Simh pleure Ni John Fru Ndi

L’opposant charismatique  Ni John Fru Ndi est mort dans la nuit du lundi 12 juin 2023 à Yaoundé, des suites de longue maladie. Le Chairman John Fru Ndi, à la tête du SDF depuis 1990, est décédé à près de 82 ans.  A l’annonce de sa disparition, de nombreux hommes politiques n’ont pas pu dissimuler leurs émotions, et ont exprimé leur compassion aussi bien à sa famille politique qu’à sa famille nucléaire. Maitre Emmanuel Simh, dans un texte émouvant publié sur internet évoque «Un homme d’une grande simplicité.

CHAIRMAN, FOR GLORY

Mister Chairman,

C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris ton départ pour l’éternité ce matin.

Il m’a alors semblé naturel de te rendre, dans ces quelques lignes, l’hommage que je te dois, comme camarade de lutte, mais surtout comme inspirateur politique.

J’ai en effet, tout jeune, et comme beaucoup de camerounais, été subjugué par le courage dont tu as fait preuve, pendant les années de braise au début des annees 1990, pour t’opppser à un régime monolithique qui ne s’était pas encore départi, malgré un discours contraire, de la répression politique.

C’est ce qui t’a fait apparaître à l’époque comme le plus charismatique des leaders de l’opposition, et sans conteste.

Je me souviendrai toujours de cette élection présidentielle d’octobre 1992, au cours de laquelle je me suis rendu pour la première fois dans un bureau de vote, pour choisir ton bulletin, ce boit de papier qui représentait pour moi le gage du changement.

Quelques années plus tard, malgré la réticence de ma pauvre mère, qui craignait pour ma vie, j’ai décidé de prendre la barque à tes côtés, pour ne pas rester un simple spectateur dans ce combatque je savais difficile.

Je me souviendrai toujours de ce jour au mois de mai 2002, alors que j’étais candidat titulaire à la députation dans la Sanaga Maritime et tête de liste SDF à la mairie de Dizangué, mes colistiers et moi sommes arrivés chez toi à Ntarikon aux aurores, pour préparer la campagne électorale.

Quand le gardien nous a ouvert le portail, nous avons été surpris de te voir sortant d’un coin de ta concession, avec de grosses mangues entre tes mains.

C’est la première fois que je rencontrais mon idole.

Je découvre alors un homme d’une grande simplicité, qui, après nous avoir, dans la blague, demandé si nos femmes nous avaient chassés de la maison, vu l’heure matinale, remarque nos regards incrédules et nous dit dans le même élan, qu’il aime bien le matin aller ramasser les mangues lui-même.

À peine installés par tes soins dans la maison, tu as appelée ta femme Rose, pour nous préparer un copieux petit déjeuner, que nous avons pris avec grâce pendant que tu t’apprêtais pour notre réunion que nous tiendrons dans ton bureau.

Cette image contrastait terriblement avec celle de ce tribun au poing levé, le discours radical contre le régime, et dont la légende disait qu’il bloquait les balles des armes à feu.

Comment ne pas évoquer ces trois jours passés ensemble pendant la campagne électorale dans notre circonscription, arpentant les routes difficiles de la Sanaga Maritime, de Pouma à Mouanko, tenant quantité de meetings, dans un pidgin english que tout le monde comprenait.

Tu m’avais alors demandé de te faire des notes sur ce département qui m’a vu naître, pour tes meetings électoraux.

C’est à cette occasion, lors du meeting de Mbongo, alors qu’on attendait que tu prennes à nouveau la parole, que tu m’as dit: « Young man, you have the floor », me mettant ainsi pour la première face à un public, pour délivrer un discours de campagne.

Une belle aventure qui s’était terminée pour moi par un poste de conseiller municipal et un sscore plus qu’honorable aux législatives.

J’ai aussi eu la chance d’être ton Avocat, au cours de ce célèbre procès consécutif au décès de notre camarade Diboulè dans des circonstances malheureuses.

À la fin des audiences, tu invitais les avocats chez toi pour une collation, et souvent tenait à les servir toi-même.

Alors va, Chairman. La maladie a fini par avoir raison de toi. Tu retrouveras ta douce Rose là-bas, dans la félicité éternelle.

Merci pour ce que tu m’auras apporté, comme homme, comme politicien.

Merci pour ce que auras apporté à notre pays, par ton combat. La vie politique n’aura pas été facile pour toi, je sais, mais comme dirait l’Écriture, tu as combattu le bon combat, un combat qui n’aura pas été vain.

Maintenant va, Mister Chairman, et repose en paix.

You are the Chairman, for ever.

Emmanuel SIMH.

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