Observateur de la scène politique au Cameroun, Jean-Pierre Du Pont maintient que l’ancien ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement est habile en politique.
Tchiroma – ou Ciroma, selon la prononciation haoussa – est un homme rompu aux subtilités du jeu politique. Habile manœuvrier, il pratique l’art du camouflage avec un talent consommé. Courtisan quand il le faut, humble en apparence, il sait se faire discret pour mieux s’imposer lorsque le vent tourne. Sous ses airs de fidèle serviteur se cache un stratège retors, prompt à révéler son vrai visage dès que le rapport de force lui devient favorable.
À l’image de Biya face à Ahidjo, il a su jouer les humbles pour s’approcher du trône, rasant les murs et multipliant les courbettes, tel un courtisan madré qui fait l’âne pour brouter le foin. L’erreur fatale de ses adversaires fut de le sous-estimer. En l’autorisant à se présenter à l’élection présidentielle, ils l’ont pris pour quantité négligeable — contrairement à Kamto, qu’ils redoutaient comme la peste. Mais, ce faisant, ils lui ont ouvert la porte du pouvoir.
Et là, tout a changé : l’homme docile s’est mué en prédateur politique. Le sourire s’est effacé, les crocs se sont découverts, et le flatteur d’hier est devenu le maître du jour.
Ce que Biya n’a pas compris – et c’est ce qui le ronge aujourd’hui – c’est que Tchiroma est un politicien souple, insinuant, capable de feindre la dévotion pour mieux séduire le pouvoir. Sous son apparente humilité se cache un ambitieux calculateur, opportuniste rusé et stratège averti. Autrement dit : un homme politique au sens plein du terme.
Car la politique, c’est cela. Aucun projet de société, aussi noble ou élaboré soit-il, ne quitte le stade de la chimère sans le pouvoir pour le réaliser. Et le pouvoir, on ne le prête pas, on ne le partage pas, on ne l’octroie pas : il se conquiert ou s’arrache. Depuis Sartre, on sait que tous les moyens sont bons, pourvu qu’ils soient efficaces à l’arrivée.
Lorsque, dans un ou deux siècles, les historiens se pencheront sur les dernières années de l’intermède Biya, ils diront sans doute à propos de Tchiroma : « Salut l’artiste ! » Et ils n’auront pas tort. Quelle performance !
Jean-Pierre Du Pont
NB : Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la position éditoriale de 237actu.com.





