Trois mois avant sa mort, l’archevêque émérite a produit un ouvrage dans lequel il se confie sur ce conflit et les tentatives de résolution.
C’est le dernier ouvrage qu’il a produit avant son décès. Un livre 82 pages dans lequel Christian Cardinal Wiyghansai Tumi livre sa part de vérité sur le conflit dans les deux régions du Nord-Ouest et du Sud- Ouest. Dans ce mémoire de 80 pages intitulé « Ma nuit en captivité » rédigé avec la collaboration du Pr Charles Ngadjifna et de Martin Jumbam, l’auteur, au fil des 10 chapitres, retrace les négociations accrues, engagées en coulisses pendant plusieurs mois, depuis la genèse de ce qui n’était encore qu’une crise mineure, jusqu’au moment où il écrit ce livre. Dans le document paru chez M.C. éditeurs en décembre 2020, l’auteur raconte également les circonstances de son arrestation, de sa séquestration le mercredi, 04 novembre 2020 à Ndop, de sa libération, ainsi que les propositions, en guise de conclusion, pour sortir définitivement de cette crise qui continue de faire des victimes.
Dans son livre, l’archevêque émérite de Douala réitère la proposition de sortie de crise en page 78 : « l’armée doit retourner à la caserne où est sa place et les sécessionnistes doivent rendre les armes ». Et de poursuivre. « Alors que cette guerre s’éternise, je continue de réfléchir à ce qui se passerait si l’armée retournait à la caserne et que les « amba boys » refusaient de rendre les armes. Plus j’y pense, plus je suis convaincu que si l’armée devait se retirer dans les casernes et que les « amba boys » refusaient de déposer les armes, l’armée, qui est connue pour imposer l’ordre et la discipline, devrait sortir à nouveau des casernes et prendre le pouvoir dans le pays pendant une courte période. Après avoir imposé l’ordre et la discipline, elle devrait ensuite organiser les élections, rendre le pouvoir aux civils et se retirer dans les casernes, où est sa place ».
Tractations
Tout en indiquant par la suite qu’il n’a « personnellement jamais été favorable à un régime militaire, où que ce soit ». « Ma nuit en captivité » ne se limite pas à ces lignes. Dès le premier chapitre, l’auteur principal raconte les efforts de conciliation faits pour mettre un terme à la guerre alors que le gouvernement et les « amba boys » ne voulaient pas faire taire les armes. Il a alors convoqué un groupe d’autorités religieuses des deux régions concernées, à Douala, pour trouver des solutions, en tant qu’autorités morales, pour faire taire les armes. Il avait pris le soin de recueillir les avis des anglophones vivant à l’étranger et au Cameroun, sur, notamment, les causes et solutions de ce conflit. Et c’est ainsi que naît l’idée de la Conférence générale anglophone (Cga). Le cardinal espérait aussi voir naître un parti politique anglophone capable de défendre la cause anglophone.
Hélas. Malgré plusieurs tentatives, la Cga ne se tiendra pas. Et le Grand dialogue national (Gdn) sera convoqué par le président de la République. Pourtant, la guerre continue longtemps après sa tenue. Enlevé avec le Fon de Nso, le cardinal passera une nuit en captivité, au cours de laquelle il en saura davantage sur les sécessionnistes. Une nuit au cours de laquelle il dit avoir vu le côté humain des ravisseurs qui s’étaient également laissés emportés par cette guerre.
« Il me revient le souvenir d’un enfant rencontré à Kaikai, qui m’a dit qu’ils n’étaient plus sûrs de ce pour quoi ils se battaient, qu’il n’y avait plus d’objectif clair et précis pour leur lutte. Certains de ceux qui nous avaient retenus captifs avaient aussi affirmé qu’ils avaient perdu de vue le but de leur lutte », écrit-il dans ce livre enrichi par des images postées par ses ravisseurs sur les réseaux sociaux. Un livre de poche écrit dans un langage accessible à tous et qui se lit d’un trait.
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