Editorial de Zephirin Koloko sur la sortie du DGSN Mbarga Nguélé

Dans son éditorial de ce 30 octobre 2024, Zephirin Koloko, directeur de publication du journal L’Avenir, aborde les récentes déclarations du délégué général à la sûreté nationale, Martin Mbarga Nguele, qui critiquait l’état des routes au Cameroun. Le DP pense la colère du DGSN peut être légitime, mais soutient qu’il ne faut pas blâmer uniquement le ministre des Travaux Publics, Emmanuel Nganou Djoumessi, qui hérite d’une situation complexe et de nombreuses responsabilités.

NGANOU DJOUMESSI : COMME LE SACRIFICE EXPIATOIRE.

Par Zephirin Koloko

On dit souvent que le peuple veut du sang. Mais, le sang donné au peuple l’est-il toujours à raison ? Je m’explique.

Depuis quelques jours, la posture à charge aiguë du délégué général à la sûreté nationale, Martin Mbarga Nguele, à l’encontre <<des membres du gouvernement >> défraie la chronique. « J’ai été au Sud-Ouest à Mutengene. Entre Yaoundé et Mutengene, ça été un calvaire pour circuler. Je n’avais jamais vécu cette situation auparavant. Pourtant le président de la République a donné des orientations, il a donné des instructions, il y a des membres du gouvernement en place. Que faisons-nous pour le développement de notre pays ?», a soutenu le père de la police le samedi 26 octobre à la maison de parti RDPC de Mbalmayo, lors de l’assemblée générale de l’association pour le développement économique, social et culturel du Nyong et So’o.

Si d’aucuns ont lu à travers ces déclarations une attaque en bonne et due forme du DGSN à l’endroit d’un ministre de la République en charge des travaux publics, d’autres y ont lu de manière holistique un procès intenté à l’encontre du système en place. Toujours est-il que l’état de la route est le principal déclencheur de la colère du patron de la police. Sur le trajet qui l’amenait à Mutengene (Nationale N3), il a dû vivre le stress et l’angoisse qui sont ceux des Camerounais lambda qui utilisent ce tronçon ou d’autres.

L’état de santé des axes routiers au Cameroun, aussi bien urbains qu’interurbains, est préoccupant, c’est un fait. Les usagers de la route font face quotidiennement aux désagréments dus à la détérioration poussée des infrastructures routières.

Cependant, c’est mal appréhender le problème que de tenir rigueur au ministre des travaux publics qui lui aussi a hérité d’un dossier à la limite ingérable. On ne tire pas sur une ambulance, encore moins sur les ambulanciers.

Mieux, il faut comprendre le fond du problème de la route au Cameroun, avant de sonner la charge contre qui que ce soit.

Commençons par lever une équivoque en expliquant que toutes les routes ne relèvent pas de la compétence du ministère des travaux publics. Par exemple, sur une nationale, il existe des sections urbaines et interurbaines. Les tronçons urbains relèvent de la compétence du ministère de l’habitat et du développement urbain, avec également le concours des différentes collectivités territoriales décentralisées. Il faut donc préalablement cesser de mettre tous ces œufs dans le panier du Mintp.

Néanmoins, l’on ne peut balayer d’un revers de la main les propos du DGSN. Il faut cependant que l’on se comprenne bien. Les routes se dégradent parce qu’elles sont vieilles. Nombre d’entre elles dépassent leur durée de vie (20 ans).

Il y a aussi des averses avec d’énormes quantités d’eau qui s’infiltrent sous les chaussées. Les ouvrages de drainage ne fonctionnent pas de façon optimale, vu qu’ils n’ont pas été dimensionnés pour capter les énormes quantités d’eau actuelles.

A contrario, de nouveaux linéaires ont été construits ces cinq dernières années (autoroute Kribi-Lolabe, phase I de l’autoroute Douala-Yaoundé, route Dabanga-Mora-Kousseri, voiries des villes de Douala et Yaoundé, pont frontalier de la Cross River entre Ekok et Mfum, route Batchenga-Ntui…). En clair , entre 2016 et 2023, près de 3000 km de routes neuves ont été construites sous le magister du Ministre des Travaux Publics Emmanuel Nganou Djoumessi.

Tout comme d’autres sont en construction. Notons quand même que depuis l’arrivée de Nganou Djoumessi à la tête du Mintp, des tronçons entiers ont été réhabilités (réhabilitation de la route Yaoundé-Bafoussam-Babadjou, réhabilitation de la route Nsimalen-Mbalmayo-Ebolowa, construction d’une centaine de dalots sur la route Douala-Yaoundé…)

Au terme du 31 août 2023, 07 projets routiers ont été achevés et livrés.

Difficultés structurelles

Le boom démographique avec pour corollaire la hausse de la fréquentation des axes routiers n’aide pas beaucoup, dans un contexte de resserrement de la dépense ; le nerf de la guerre.

Le Cameroun fait face à une crise financière connue de tous, accentuée par les défis sécuritaires (lutte contre Boko Haram, crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, subventions accordées par l’Etat pour juguler l’inflation qui touche les produits de grande consommation) auxquels il est confronté.

L’Etat est financièrement à l’étroit et a du mal à gérer l’ensemble des problèmes dont ceux liés à la route. Pour réaliser les projets routiers quels qu’ils soient, il faut de l’argent, beaucoup d’argent. Les entreprises choisies pour réhabiliter les routes ont un rendement faible car leurs capacités financières sont faibles. Les avances et les décomptes ne sont pas payés dans les délais.

Les responsables du ministère des finances que nous avons consultés sont d’ailleurs unanimes. Il ne se passe pas une semaine sans que le Mintp ne saisisse le Minfi pour solliciter le déblocage des fonds en vue de remplir son cahier de charges. Mais, où est l’argent ? Where is money ? A côté de cela, il faut noter que le Cameroun est sous ajustement structurel avec le fonds monétaire international et donc, le taux d’endettement est plafonné à l’international.

Le pays croule sous les urgences, tous les dossiers sont importants. De nombreux projets routiers sont sur la sellette. Le fonds routier, cet organisme de financement et de paiement des prestations d’entretien routier, est largement insuffisant. Résultat des courses, il est impossible pour ledit fonds d’entretenir les routes dans toutes les régions. Cela ne signifie pas que des efforts ne sont pas fournis.

On pousse on met la cale.

Plus de 8 000 projets dans le cadre de l’entretien routier ont été financés par le Fonds, plus de 700 milliards de FCFA injectés dans le circuit économique et plus de 1 500 entreprises de BTP financées.

Le ministre des travaux publics va même utiliser une pirouette pour tenir la dragée haute aux défis, les travaux en régie. Une stratégie qui a prouvé son efficacité par exemple pour la route Dabanga-Mora-Kousseri ou encore sur celle Obala-Batchenga. Cette stratégie facilite la mobilisation des équipes et permet de réaliser des économies. L’on constate donc que Nganou Djoumessi fait des pieds et des mains pour trouver des solutions.

Ajoutons aussi que le Mintp est l’un des premiers ministères à avoir transféré les ressources aux collectivités territoriales décentralisées dans le cadre de l’accomplissement de certaines missions, surtout l’entretien des routes. Mais que font les CTD ?

De tous les ministres des travaux publics, Nganou Djoumessi est celui qui a à son actif les réalisations les plus palpables. Parlons par exemple des travaux confortatifs dont les ressources résultent à la fois du fonds routier et du budget d’investissement public. Pour cet exercice 2024, le budget du Ministère des Travaux Publics a prévu une allocation de 65 Milliards issus à la fois du Fonds Routier et du BIP, pour l’exécution des travaux confortatifs sur les sections Yaoundé-Douala (233 km), Nationale 3, Gaklé-Mokolo (66,36 km) Nationale 1, Bekoko-Loum-Nkongsamba-Pont du Nkam-Bafang-Bandja-Bandjoun (219 km) Nationale 5, Edéa-Kribi (110 km) et Yaoundé- Échangeur Ahala- Rond-point Tropicana-Carrefour de l’amitié-Carrefour Nkoabang- Ayos-Bonis (329, 18 km), Nationale 10.

Ces travaux ont non seulement pour but de traiter les dégradations, d’effectuer des travaux d’assainissement, de chaussée et de signalisation, mais aussi et surtout, de donner un nouveau visage à ces axes et rendre aisée, la circulation des usagers et des biens.

A date, les marchés des travaux sont attribués pour les sections citées et les entreprises déjà mobilisées sur les différents sites, n’attendent que la fin de la saison des pluies pour donner de l’ampleur aux travaux.

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